INTERVIEW



Entretien téléphonique avec Doro
Le 10/02/2005
Par The Undertaker
 

A des années-lumière des groupes de métal à chanteuse qui envahissent nos ondes avec le bonheur marié d’éphémère des tendances, Doro, elle, n’a jamais eu les honneurs des marchands de singles mais perdure avec passion et sincérité depuis plus de deux décennies. Cette blonde n’avait déjà pas choisi avec Warlock de prostituer son paraître, mais défendait avec dignité les couleurs du thrash à une époque où celui-ci était plus que jamais marginalisé. L’une des rares représentante du métal des 80’s (avec Lee Aaron par exemple), a donc répondu avec calme et gentillesse à nos interrogations…

 

ARTeFACT : Avant de revenir sur l’ensemble de ta carrière, pourrais-tu nous parler de ton travail avec l’orchestre symphonique que nous avons eu l’occasion de croiser à Wacken par exemple l’été dernier, et que nous trouvons aujourd’hui dans les bacs ?
Doro :
Au départ nous ne devions pas pousser le projet aussi loin, j’ai trouvé l’idée vraiment intéressante quand on me l’a soumise et c’est en commençant à travailler avec cet orchestre que nous avons décidé de faire plusieurs spectacles. C’était d’autant plus amusant de travailler avec un orchestre qu’il se composait de musiciens jeunes, et donc très dynamiques et investis dans leur rôle. L’ambiance était excellente et cela nous a vraiment poussés à approfondir la chose. Ces musiciens n’étaient pas seulement intéressés par la musique classique mais possédaient en plus une culture rock importante, ce qui a favorisé leur immersion dans le feeling qu’il fallait avoir pour jouer les morceaux, et permis l’échange d’idées et de réactions.
L’idée d’un tel projet s’était déjà présentée il y a huit ans dans un contexte différent, nous avions travaillé deux mois dessus mais cela n’avait finalement pas abouti à quelque chose de conséquent. Cette fois nous sommes restés huit mois à enregistrer ! Ensuite, je me suis adressé à mon fan club en leur demandant s’ils désiraient entendre d’autres morceaux avec l’orchestre. C’est là que nous avons décidé d’ajouter « Tausend Mal Gelebt », ainsi que les reprises d’Iron Maiden et Judas Priest. Et finalement je crois que c’est « Breaking The Law » ma chanson préférée de l’album ! (rires) Nous avons pris un tel plaisir à retravailler les arrangements avec le Classic Night Orchestra…

A : Le moins que l’on puisse dire est que le succès fut au rendez-vous également sur scène…
D :
Oui ! Cela fait tout drôle de se retrouver à quarante musiciens sur scène ! J’ai toujours voulu connaître cette sensation au moins une fois dans ma vie, et ce moment est arrivé… J’ai tellement adoré jouer à Wacken devant des dizaines de milliers de personnes, cela a nécessité une concentration toute particulière tant pour moi que pour les musiciens qui ne pouvaient pas se permettre de jouer une seule fausse note. Nous étions en plus accompagnés ce jour-là de Blaze Bayley (ndlr : ex Iron Maiden) et Chris Caffery (ndlr : Savatage) qui ont dû s’accommoder des nouveaux arrangements en un temps record ! (rires) Sur les autres dates c’était Udo Dirkschneider qui faisait le chant masculin, et qui est donc présent sur la version cd de l’album « Classic Diamonds ».

A : Lors de ce concert à Wacken, tu as d’ailleurs retrouvé tes anciens compagnons de Warlock… 
D :
Nous voulions faire quelque chose d’exceptionnel pour les 15 ans du Wacken Open Air, c’est donc dans cette optique que nous avons réuni les membres du groupe de 1986. Le concert en lui-même fut bien entendu exceptionnel, mais comme chacun sait le nom de « Warlock » ne nous appartient pas. Cela remonte à 1989, c’est notre manager de l’époque qui détenait le nom, ce qui nous a conduit à la reformation sous mon nom. De ce fait, nous avons déposé le nom « Warlock line-up 1986 » pour Wacken, mais cela a créé de nouveau des problèmes et nous sommes malheureusement encore en conflit. Je trouve toutes ces histoires vraiment navrantes et je fais en sorte que cela ne se répercute pas sur le goût du public, ce n’est vraiment pas ces affaires de business l’important.

A : Pour revenir au sujet, quel intérêt portes-tu à la musique classique d’un point de vue personnel ?
D :
Mes parents et surtout mon père étaient très connaisseurs en musique classique et j’en entendais tout le temps quand j’étais petite. A l’époque je trouvais cela ennuyeux au possible ! (rires) Aujourd’hui c’est comme pour le métal, il y a des compositeurs que j’apprécie plus que d’autres, mais mes idoles resteront encore Motörhead pour le moment !

A : Ton style de composition aujourd’hui peut toucher un public plus large que celui du métal proprement dit, penses-tu que tes albums arrivent à toucher une cible aussi large ?
D :
J’espère que oui, mais il est difficile de savoir vraiment qui achète les disques. Nous pouvons seulement observer les ventes en terme de quantité ; elles me permettent de vivre de ma passion, et cela me suffit déjà pleinement. Ceci dépend beaucoup de facteurs externes comme la promotion, nous n’avons jusqu’à présent que très peu entendu ma musique à la télévision ou à la radio, même en Allemagne… Je fais simplement de mon mieux pour être la plus proche possible de mes fans, ce qui est le plus important à mes yeux.
Au niveau de la composition, j’attache une importance particulière à l’émotion que transmettent les paroles, je parle souvent de la douleur ressentie lors de la mort de quelqu’un qu’on aime… « Für Immer » est par contre une chanson positive qui exprime le bonheur de vivre sa passion jusqu’au bout, et il y a aussi des titres rock comme « Burn It Up » pour s’éclater tout simplement !

A : Quels sont maintenant tes projets ?
D :
Nous allons faire des festivals l’été prochain en Europe, notamment les 10 ans du Bang Your Head. On espère pouvoir passer en France, nos managers sont d’ailleurs en train de travailler là-dessus en ce moment. Sinon je réfléchis déjà au prochain album studio traditionnel et j’ai également un projet de film avec un producteur que nous avons rencontré sur la dernière tournée. Nous commencerions à travailler dessus en septembre prochain, ce serait une sorte de conte dans un univers féerique qui prendrait place dans un lieu comme Stonehenge, et dans lequel je jouerais le personnage de Mya. Le projet commence à se mettre vraiment en place, et j’espère vraiment que cela va se faire ! 

A : Pourrais-tu maintenant nous parler du fait d’être une femme dans le milieu de la scène, cela a-t-il évolué depuis tes débuts ?
D :
J’ai eu la chance d’être respectée dès le début, j’ai toujours été traitée comme l’aurais été un homme et je n’ai jamais subi quelconque discrimination ou machisme. Je sais à quel point ce peut être parfois difficile d’évoluer dans ce milieu en tant que femme. Il y a aujourd’hui beaucoup plus de femmes qu’avant, et par conséquent la concurrence les amène à plus étaler leur vie privée à des fins de promotion, ce qui ne se serait pas produit il y a vingt ans. Dès 1983 j’ai été respectée pour le courage que j’avais d’être une des seules chanteuses dans le hard rock, j’étais donc bien entourée et protégée en quelques sortes. 

A : A cette époque Warlock partageait déjà l’affiche avec des groupes comme Metallica…
D :
Oui, nous avons joué de nombreuses fois ensemble. En 1983, c’était le début du heavy métal et nous avons fait des concerts avec Metallica devant cinq cents personnes ! C’est incroyable de se dire cela aujourd’hui, nous avons joué dans beaucoup de petits club avec eux, je me rappelle avoir joué à San Francisco dans une petite salle qui s’appelait « The Stone » où personne ne savait jusqu’alors ce qu’était le heavy métal ! (rires) Le public était totalement surpris par ce nouveau style inconnu à l’époque, mais le mouvement a pris très vite beaucoup d’ampleur. Quand nous avons rejoué avec Metallica en 1985, le groupe avait pris une importance énorme, ils n’étaient déjà plus de simples rockeurs et le temps n’était plus à faire la fête ensemble n’importe comment ! Je les ai revus en 2003 et j’ai été heureuse de voir qu’ils avaient encore une sacrée énergie, surtout après ce que James Hetfield a traversé… J’étais assez proche de lui dans les années 80 mais nous avons ensuite perdu contact à cause de nos rythmes de vie respectifs… Cela dit je suis plus que jamais une fan du groupe !

A : Doro en trois mots…
D :
Unité, fraternité, famille.

Site Officiel : www.doropesch.com

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