INTERVIEW



Par The Butcher, le 30/10/2004, pour la sortie de leur nouvel album "Mourning Sign".
 

Après "Close To Heaven", Distress est de retour pour un nouvel album "Mourning Sign" toujours empreint de noirceur et d'espoir combinés. L'occasion de faire plus ample connaissance avec cette mystérieuse et talentueuse formation était immanquable. Entretien avec Philippe Miralles, guitariste et chanteur de la formation.

ARTeFACT : Peux-tu nous présenter Distress, son principe fondateur, son fonctionnement, son objectif ?
Philippe Miralles : Distress a déjà 8 ans d’existence. Le groupe a été fondé par Laurent Hass (Batterie) et moi même. Les premières années furent assez chaotiques mais les arrivées d’un guitariste il y a 3 ans et demi et il y a un an d’un bassiste ont permis de stabiliser un peu les choses.Notre but est de faire une musique métal inclassable, mélange d’influences ayant une base doom (My Dying Bride, Paradise Lost, Anathema) mais se voulant plus dynamique avec des inspirations thrash / death.Pour ce qui est du fonctionnement du groupe, j’étais jusqu’à cet album le principal compositeur car le groupe n’était pas stable et reposait donc beaucoup sur moi. Heureusement la situation s’est assainie avec l’arrivée de notre bassiste il y a un an. Nous sommes désormais quatre dans le groupe, ce qui ouvre des perspectives enthousiasmantes de composition à plusieurs ce qui pour nous est primordial.

A : Comment décris-tu ta musique ?
PM : C’est clairement du métal, doom dans l’esprit, presque gothique par moments mais qui s’équilibre avec des éléments thrash et death pour l’énergie libératrice dont tu parles dans ta chronique. On retrouve aussi des influences heavy qui se font cependant de moins en moins présentes. Nous essayons d’offrir des atmosphères variées tout en gardant une cohérence d’ensemble. Ainsi les rythmes et le chant varient pour coller aux ambiances et la musique est ramassée, focalisée sur l’efficacité.

A : Comment ce style si particulier s’est il dessiné dans ta tête ? Etait-ce une idée précise, le fruit d’une longue maturation ou quelque chose d’immédiat ?
PM : Un peu de tout cela en fait : l’origine des morceaux découle d’une mélodie spontanée qui vient des tripes et dont on travaille ensuite beaucoup la structures, les arrangements, le placement du chant etc. Le style qu’on retrouve sur « Mourning Sign » découle de celui de « Close To Heaven » mais il se fait pourtant plus varié à mon sens et je pense que la composition à quatre permettra d’y apporter encore plus de nouveaux éléments et une fraîcheur supplémentaire.

A : Tu arrives à exprimer beaucoup d’émotions à travers ta musique et ton chant au point qu’on peut se faire du souci pour ta santé mentale. Es-tu sujet au désespoir absolu ?
PM : C’est délicat de répondre à cette question… «
Close To Heaven » servait à extérioriser des souffrances anciennes issues de l’enfance et de l’adolescence. C’était pour moi un exutoire vital, mais par pudeur tout n’est pas sorti avec ce premier album, c’est pourquoi j’ai décidé de mettre le paquet sur « Mourning Sign » pour me débarrasser de tout ce qui me pesait depuis tant d’années. Ceci explique la violence accrue de ce nouvel album qui se fait moins triste mais plus torturé. Mon but est de parler de ce qui est douloureux pour moi, mais c’est bien plus positif que ça en a l’air… en effet, la période qui a précédé la réalisation de « Mourning Sign » a été sans aucun doute la pire période de ma vie et l’accouchement du disque fut aussi douloureux et je peux te dire que maintenant que j’ai exprimé ce que j’avais à exprimer et que l’album est sorti, je vais beaucoup mieux.

A : L’accouchement a en effet été long puisque « Mourning Sign » a été enregistré en 2002…
PM : Oui c’est exact. Ce délai important entre «
Close To Heaven » et ce nouvel album n’est pas voulu… Nous avons eu à peu près tous les problèmes possibles et imaginables lors de l’enregistrement du disque durant l’été 2002 qui a pris beaucoup de temps puis le mixage fut encore pire et a duré plusieurs mois jusqu’à mi-2003. Nous avons ensuite eu des soucis avec la réalisation de la pochette puis des ennuis au pressage du CD et pour couronner le tout il y avait des tensions dans le groupe qui nous ont mené au bord du split… Mais tout est rentré dans l’ordre avec un regain de stabilité dans le groupe et la salvatrice sortie de l’album… l’auto-production c’est dur. Tenez-vous le pour dit !

A : Cette attente est un peu dommage compte tenu des très bonnes chroniques reçues par « Close To Heaven » dont vous auriez sans doute voulu tirer parti…
PM : C’est vrai que nous avons eu des échos très positifs sur «
Close To Heaven », mais on ne peut pas dire que la sortie de notre nouvel album était attendue… Nous avons donc préféré prendre le temps de faire les choses bien pour être aussi contents du résultat que possible.

A : J’imagine que le successeur de « Mourning Sign » doit être proche de l’enregistrement, non ?
PM : Non, pas encore, mais la composition est bien avancée. Depuis 1 an, et la stabilisation de notre line up, nous avons envie de composer à plusieurs et c’est ce que nous faisons avec un résultat selon moi plus que prometteur. 

A : Vous êtes toujours chez Thundering Records. Vous vous y sentez bien ?
PM : Ah oui ! nous sommes très bien au sein de Thundering Records car nous avons une totale liberté artistique, ce qui ne serait probablement pas le cas dans une major... Laurent (Bocquet) a confiance en nous et nous laisse totale latitude, ce qui est fondamental pour nous. Nous étions contents du travail de Thundering sur «
Close To Heaven » et nous n’avons donc pas hésité une seconde avant de re-signer avec ce label.

A : Pour toi quelles sont les évolutions que marque « Mourning Sign » par rapport à « Close To Heaven » ?
PM : «
Close To Heaven » était mélodique, intimiste, plus métal gothique avec des accélérations ici ou là. C’était un album triste, assez hermétique avec des textes durs mais une musique finalement assez fraîche. « Mourning Sign » est plus compact, nos influences sont mieux digérées. Il faut être lucide sur ce qu’on fait. J’ai du mal à croire que des groupes osent sortir des albums dans lesquels ils pompent sans vergogne d’autres groupes. Si ils ne s’en rendent pas compte, c’est inquiétant pour eux : ils n’ont pas l’oreille musicale ! (rires). Nous écoutons beaucoup de styles différents et la digestion de ces écoutes alimente notre créativité et ces influences ressortent à notre sauce, d’une façon qui nous représente plus, généralement plus violente (rires).

A : Et qu’écoutez-vous ?
PM : Pour ma part j’adore les Beatles, Pink Floyd, j’écoute aussi de la pop et des groupes comme Placebo ou Radiohead… Notre guitariste lui est amateur de musiques électroniques…

A : Et ben ! difficile de se douter de cela à l’écoute de votre musique. Pour digérer, vous digérez bien ! heureusement car je vois mal un beat electro sur l’album (rires). Pour en revenir aux évolutions entre les deux albums, qu’en est-il du son ? Est-il à la hauteur de ce que vous attendiez ?
PM : Oui si ce n’est peut-être le son de la batterie sur lequel nous avons eu beaucoup de problèmes lors de l’enregistrement. Nous avons les grosses guitares écrasantes que nous voulions. On a quelques critiques vis à vis de notre son, mais, même s’il aurait pu être plus clair et plus policé, nous estimons qu’il colle bien à nos morceaux. Et puis c’est aussi une question de budget. Nous avons fait du mieux possible avec les moyens dont nous disposions, notamment au niveau du mixage subtil… Evidemment, ce qui est dur c’est d’être jugés sur les mêmes critères que des groupes qui ont 10 ou 20 fois notre budget pour enregistrer un disque. Néanmoins ce sont les règles du jeux et on fera mieux à chaque fois.

A : et puis selon moi, vous avez un son propre, avec un identité forte qui fait aussi partie du charme de votre musique. Ça nous change des productions cliniques qui stérilisent trop souvent l’identité des groupes… 
PM : C’est vrai que c’est un équilibre fragile entre la musique et le son qui définit l’identité sonore d’un groupe.

A : Avez-vous eu l’occasion de tourner ?
PM : Nous avons fait des concerts isolés. Il ne nous a pas été possible de tourner pour diverses raisons : line up instable, manque de temps, manque d’argent… Tourner revient excessivement cher… Au final, nous n’avons pas donné autant de concerts que nous l’aurions souhaité, mais ce n’est en aucun cas par manque de goût pour la scène, au contraire !

A : D’où te vient ton inspiration pour ta musique et tes textes ?
PM : Elle vient essentiellement de choses que je dois évacuer… « Mourning Sign » exprime la révolte par rapport à des situations difficiles, la libération de l’influence de l’entourage, le besoin de revendiquer son individualité, de devenir soi-même et de se défaire des idées pré-mâchées de son éducation.

A : Quelles sont tes influences musicales ?
PM : Comme je l’ai dit tout à l’heure, My Dying Bride, Anathema, Paradise Lost sont des influences majeures pour moi avec des groupes comme Dimmu Borgir, Nevermore ou Samael dont le nouvel album arrive enfin… Contrairement à ce que beaucoup ont dit, Metallica n’est pas une influence pour moi. J’ai certes écouté ce groupe dans ma jeunesse mais ça fait longtemps que je ne l’écoute plus…

A : Tu m’étonnes (rires) ! Quelle est ta dernière découverte musicale ?
PM : (ndlr : sans hésiter) Le dernier album de Scarve, « Irradiant », m’a collé au mur…

A : Distress en 3 mots ?
PM : 3 mots ? c’est dur… (ndlr : il réfléchit un moment…) Sincérité, Espoir (et non désespoir !), Indépendance.

A : Un dernier mot pour nos lecteurs ?
PM : Surtout continuez à défendre le métal dans son ensemble car c’est une musique marginalisée qui ne vit que grâce aux passionnés qui la font, l’écoute ou en parlent. Pour Distress, je dirais simplement que nous sommes un groupe à part avec quelque chose à offrir à ceux qui cherchent quelque chose de différent, hors normes et libre des carcans commerciaux ou autres. Merci.




Site Officiel : www.distress-music.com

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